Quelques réflexions sur la généalogie du moteur de la "Bugatti" Veyron
Il était une fois une berline compacte (la Golf) dans laquelle un constructeur voulait installer un 6 cylindres pour lui donner une image haut de gamme.
Cette berline était une traction avant à moteur transversal conçue autour d'un 4 en ligne. On ne pouvait donc pas y caser un 6 cylindres conçu selon les règles de l'art, c.à.d. un V6 ouvert à 60° ou un 6 en ligne. Le constructeur ambitieux ne se laissa pas démonter par ce détail, et il conçut un V6 en lui donnant un angle très fermé de 15° et en disposant les cylindres en quinconce.
Le VR6, tel est son nom, était aussi compact qu'un 4 cylindres en ligne. Mais de par son architecture il ne présentait pas la même régularité de fonctionnement qu'un V6 de conception classique. Rappelons qu'un moteur en V ayant N cylindres doit avoir un angle d'ouverture de 360°/N pour avoir une bonne régularité cyclique, ce qui est le cas pour les V6 à 60° ou encore pour le flat 6 Porsche dont l'angle du V est de 180°, mais pas pour les V6 Mercedes à 90° obtenus en tronçonnant un V8 ! De plus, la compacité du VR6 avait pour conséquence des tubulures d'admission à la forme torturée, d'où des pertes de charge et un rendement moins bon que celui d'un 6 cylindres traditionnel.
Bref, aux yeux d'un ingénieur, ce moteur à l'architecture inhabituelle souffrait d'une malformation de naissance...
Plus tard, ce constructeur manifesta plus d'ambition et voulut installer un 8 cylindres sous le capot d'une berline dite moyenne supérieure (la Passat). Le Dr. Volkenstein prit donc 2 VR6, amputa chacun de 2 cylindres et de son vilebrequin, et les greffa sur un vilebrequin commun pour obtenir une chose qu'il nomma W8 et qui était en réalité un double VR4 (pour s'appeler W8, il aurait fallu que ces frères siamois fussent attachés par le carter et non par le vilebrequin).
Toujours plus ambitieux, ce constructeur conçut une berline de prestige (la Phaëton). Comme il voulait la doter d'un moteur noble, et qu'il était sans doute touché par une rémission passagère, il lui donna un vrai V8 conçu par Audi... Mais les vieux démons revinrent vite le hanter, et quand il voulut la doter d'un 12 cylindres, il reprit, devinez quoi, 2 VR6 et refit la même opération pour obtenir une chose qu'il nomma W12. Cette fois, il ne fut pas nécessaire de tronçonner les VR6 avant de les jumeler, mais le constructeur avait déjà satisfait ses instincts en créant le VR5...
Cette berline ne se vendit guère. Alors notre constructeur acheta un nom prestigieux (Bentley) et réutilisa la base et le moteur de sa grosse berline (la Phaëton) pour en faire un coupé (la Continental GT). Bien que gavée par 2 turbocompresseurs et en dépit de son étiquette Bentley, la chose reste un double VR6...
Comme cela ne suffisait toujours pas à satisfaire l'ambition de notre constructeur, il racheta un nom encore plus prestigieux (Bugatti). Que fit le Dr. Volkenstein pour motoriser sa nouvelle voiture (la Veyron) ? Il prit à nouveau, cela devient maintenant facile à deviner, 2 VR6. Sans doute pris de remords, il renonça à les tronçonner et leur greffa 2 cylindres supplémentaires afin d'en faire des VR8 avant de les transformer en frères siamois et de nommer "W16" la chose qui en est résulté.
Mes chers amis, avant de nous extasier sur le moteur de la Veyron, souvenons-nous que le W16, en dépit de son étiquette "Bugatti", n'est qu'un descendant bâtard d'un moteur dont l'architecture résulte d'un compromis technique destiné à caser un 6 cylindres sous le capot d'une voiture populaire ("Volkswagen", en allemand)...
[size="1"][ 16.02.2005, 23:52: Message édité par : 350z ][/size]
Il était une fois une berline compacte (la Golf) dans laquelle un constructeur voulait installer un 6 cylindres pour lui donner une image haut de gamme.
Cette berline était une traction avant à moteur transversal conçue autour d'un 4 en ligne. On ne pouvait donc pas y caser un 6 cylindres conçu selon les règles de l'art, c.à.d. un V6 ouvert à 60° ou un 6 en ligne. Le constructeur ambitieux ne se laissa pas démonter par ce détail, et il conçut un V6 en lui donnant un angle très fermé de 15° et en disposant les cylindres en quinconce.
Le VR6, tel est son nom, était aussi compact qu'un 4 cylindres en ligne. Mais de par son architecture il ne présentait pas la même régularité de fonctionnement qu'un V6 de conception classique. Rappelons qu'un moteur en V ayant N cylindres doit avoir un angle d'ouverture de 360°/N pour avoir une bonne régularité cyclique, ce qui est le cas pour les V6 à 60° ou encore pour le flat 6 Porsche dont l'angle du V est de 180°, mais pas pour les V6 Mercedes à 90° obtenus en tronçonnant un V8 ! De plus, la compacité du VR6 avait pour conséquence des tubulures d'admission à la forme torturée, d'où des pertes de charge et un rendement moins bon que celui d'un 6 cylindres traditionnel.
Bref, aux yeux d'un ingénieur, ce moteur à l'architecture inhabituelle souffrait d'une malformation de naissance...
Plus tard, ce constructeur manifesta plus d'ambition et voulut installer un 8 cylindres sous le capot d'une berline dite moyenne supérieure (la Passat). Le Dr. Volkenstein prit donc 2 VR6, amputa chacun de 2 cylindres et de son vilebrequin, et les greffa sur un vilebrequin commun pour obtenir une chose qu'il nomma W8 et qui était en réalité un double VR4 (pour s'appeler W8, il aurait fallu que ces frères siamois fussent attachés par le carter et non par le vilebrequin).
Toujours plus ambitieux, ce constructeur conçut une berline de prestige (la Phaëton). Comme il voulait la doter d'un moteur noble, et qu'il était sans doute touché par une rémission passagère, il lui donna un vrai V8 conçu par Audi... Mais les vieux démons revinrent vite le hanter, et quand il voulut la doter d'un 12 cylindres, il reprit, devinez quoi, 2 VR6 et refit la même opération pour obtenir une chose qu'il nomma W12. Cette fois, il ne fut pas nécessaire de tronçonner les VR6 avant de les jumeler, mais le constructeur avait déjà satisfait ses instincts en créant le VR5...
Cette berline ne se vendit guère. Alors notre constructeur acheta un nom prestigieux (Bentley) et réutilisa la base et le moteur de sa grosse berline (la Phaëton) pour en faire un coupé (la Continental GT). Bien que gavée par 2 turbocompresseurs et en dépit de son étiquette Bentley, la chose reste un double VR6...
Comme cela ne suffisait toujours pas à satisfaire l'ambition de notre constructeur, il racheta un nom encore plus prestigieux (Bugatti). Que fit le Dr. Volkenstein pour motoriser sa nouvelle voiture (la Veyron) ? Il prit à nouveau, cela devient maintenant facile à deviner, 2 VR6. Sans doute pris de remords, il renonça à les tronçonner et leur greffa 2 cylindres supplémentaires afin d'en faire des VR8 avant de les transformer en frères siamois et de nommer "W16" la chose qui en est résulté.
Mes chers amis, avant de nous extasier sur le moteur de la Veyron, souvenons-nous que le W16, en dépit de son étiquette "Bugatti", n'est qu'un descendant bâtard d'un moteur dont l'architecture résulte d'un compromis technique destiné à caser un 6 cylindres sous le capot d'une voiture populaire ("Volkswagen", en allemand)...
[size="1"][ 16.02.2005, 23:52: Message édité par : 350z ][/size]
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