Sur FA en réponse à un post la réponse de Kpitemflam qui a participé au développement des dernières MINI un magnifique éclairage depuis l'achat de MINI par BMW
Un petit retour en arrière s'impose :
Au milieu des années 70, l'ancienne Mini est toujours un succès, mais BLC (British Leyland) réfléchit depuis quelques années à un successeur... Plusieurs projets ont été abandonnés, ou détournés de leur but initial, principalement pour raisons budgétaires.
L'ancienne Mini a poursuivi son existence pendant les années 80, mais fin de la décennie le moteur A arrivait en fin de vie, et à bout de souffle de développement. Les futures normes de dé-pollution qui allaient être mises en place au début des années 90 auront de toute façon raison de lui.
Rover avait remplacé le moteur A par le K dans le reste de la gamme, et la production de ce petit 4 cylindres commençait à poser de sérieux problèmes économiques (c'était déjà le nerf de la guerre)...
Autre problème : la Mini était alors produite à Longbridge, et pour ceux qui ont eu la chance de pénétrer dans cette usine ont gardé le souvenir d'une production quasi artisanale, avec un des taux d'automatisation parmi les plus bas au monde pour une production de grande série.
La Direction de Rover décide fin 1992 de relancer une nouvelle fois le projet de remplacement de la Mini. Désolé, mais je ne souviens pas du nom du PDG de Rover de l'époque. Par contre, lcelui du patron du design, c'était Gordon Sked. Il a présenté les premières ébauches de la nouvelle Mini à ses patrons en 1993. L'équipe des studios de Canley devait faire face à un autre challenge : il fallait que la nouvelle Mini remplace l'ancienne et la Métro, cette dernière étant en perte de vitesse...
Le premier mulet de la nouvelle Mini a été développé et présenté à Gaydon. Le chassis était basé sur une suspatte Hydragaz (qui avait fait ses preuves sur la Métro), et il me semble que le moteur était un 3 cylindres de 500 ou 600cm³. Ce mulet était formidablement agile et préfigurait l'étonnante tenue de route de la future New Mini.
C'est exactement à ce moment du projet que Rover a été vendu par British Aerospace à BMW. L'équipe de G. Sked a mis le projet en suspend pendant plusieurs mois en attendant de pouvoir le "vendre" en interne à BMW.
C'est là qu'intervient un acteur prépondérant de l'avenir du projet R59 : Bernd Pischetsrieder. L'ancient dirigeant de BMW, aujourd'hui fort décrié pour ses erreurs stratégiques et sa mégalomanie (pourtant loin du champion toutes catégories en la personne de tonton Ferdi), a toujours été fan des voitures anglaises. Et pour cause : Bernd, petit neveu de Sir Alec Issigonis, vouait une passion avouée aux véridiques veaux britanniques.
Bernd a mis en place en 1994 une structure de développement quasi indépendante en Angleterre. A Munich, il était bien clair que R59 était un projet Rover, dans lequel très peu de gens trempaient à Munich.
Devant le scepticisme des ingénieurs bavarois, Bernd fut "contraint" de prendre le projet R59 (nom de code donné par BMW) sous son aile. Le Directeur du Projet lui était directement rattaché. D'ailleurs, Bernd a renforcé l'équipe Projet par quelques pointures recrutées par lui-même, dont Moulton et John Cooper himself.
En 1994, j'ai commencé à bosser sur ce projet. A Gaydon, le projet était déjà bien avancé, mais à Munich, le radicalisme du véhicule (dans l'esprit de la 1ère Mini) ne plaisait pas à tous. N'oublions pas que le confort est une des valeurs fondatrices de BMW... Le bureau du design, sous l'influence des opposants de Pitschetsrieder commença à bosser sur une autre mouture de l'aspect extérieur. BMW voulait en effet une Mini qui soit à la fois un objet de mode, un véhicule économique et une référence du segment en terme de perfs.
Fin 1994 : Chris Bangle pousse son idée d'une nouvelle Mini Cooper, plus longue que la version Rover de 3,30m trop radicalement proche de l'ancienne Mini. Bangle s'assure aussi du support de W. Reitzle. BMW cherche plus à se rapprocher d'un successeur de la Cooper que de celui de la Mini.
En 1995, il y avait en fait 2 projets "New Mini" : une version anglaise basée sur une propulsion avec châssis berceaux + suspattes Hydragaz et équipée du moteur K en position arrière, et une version bavaroise, avec un McPherson à l'avant, et un multi-bras à l'arrière, avec à la place du moteur un gros point d'interrogation...
Lors de la présentation des deux concepts au Board en octobre 1995, l'unanimité s'est faite sur le concept Rover. Problème : avec une architecture au moins 10 ans en avance sur son temps, l'industrialisation allait poser un problème économique insoluble...
Entre fin 1995 et le printemps 1996, c'était carrément le foutoir, plus personne ne savait lequel des deux projets allait être abandonné.
Au milieu du printemps 1996, BMW a décidé de poursuivre sur la base du projet bavarois. Un nouveau Directeur de Projet (Chris Lee) a été nommé, et le véhicule a été rebadgé R50. Le projet a été alors été officiellement affecté au Centre de Développement Rover à Gaydon. L'ancien patron du développement BMW, Burckardt Goeschel, a piloté le transfert. A l'automne 1996, le projet anglais d'origine était définitivement enterré.
Par contre, le transfert de Munich à Gaydon s'est déroulé dans une ambiance délétère. Quasiment du jour au lendemain, plus personne n'a bossé sur le projet, et les britanniques se sont retrouvés faces à une montagne de problèmes à solutionner. Le Design Freeze avait eu lieu, mais sans moteur et sans boite. Les trains n'existaient que sur le papier (à l'état d'épure) et les mulets n'atteignaient pas de loin pas les perfs du projet britannique concurrent. Et surtout il n'y avait pas de concept d'industrialisation potable. Bref un beau merdier.
Autre problème : les ressources manquaient À Gaydon pour optimiser le châssis, et Chris Lee dû faire appel à BMW pour récupérer des ressources. Du coup, fin 1996, une nouvelle équipe d'optimisation châssis a vu le jour à Munich, mais sous la coupelle de Gaydon...
Le plus gros problème à l'époque, c'était le choix du moteur. Côté Rover, le moteur K ne semblait plus être la meilleure option, le package de la solution BMW ne permettant pas l'implantation optimale du moteur K. Côté BMW, on décide alors d'acheter le 4 cylindres Chrysler (après avoir approché d'autres constructeurs, mais le prix et le délai ont fait la différence). Donc BMW se lance dans l'aventure Tritec.
Pendant ce temps, les ingés de Gaydon essayent de se dépêtrer dans la conception des trains, le choix des matériaux, la définition des pièces et les Cahiers des Charges. A partir de là, BMW n'est plus intervenu ni dans la définition de la géométrie, ni des rigidités, des optimisations ou des essais de validation.
Le moteur Tritec a été adapté par Longbridge, ainsi que la boite. La Cooper S s'est vue équipée d'une boite Getrag.
En ce qui concerne les trains, l'objectif des ingénieurs anglais de Rover était simple : en faire la traction la plus maniable au monde. Le train arrière multibras a été très vite conçu, l'épure de BMW collant assez bien avec la rigidité attendue par les anglais. L'encombrement, par contre, s'était pas top... Et puis il y a eu des soucis avec le choix de BMW de laisser tomber les freins à disques au profit des tambours pour raisons budgétaires.
Le train avant, quant à lui, a été une horreur à développer. BMW voulait absolument un train avant "BMW", c'est-à-dire un McPherson. Alors que la solution optimale aurait été un double triangle. Du coup, de gros problèmes de transmission de couple dans la direction électrique sont apparus. Et les résoudre a été un vrai casse-tête. Ce train a coûté une fortune en développement... Heureusement que BMW assurait le financement. En 1999, la direction électrique proposée initialement par BMW a été abandonnée juste avant le lancement série. Elle ne donnait aucun feed-back et tuait le caractère incisif du châssis. Une nouvelle direction hydraulique sur base de Rover 25 a été développée par l'équipe de développement à Gaydon.
En 1997, le projet avait pris pas mal de retard. Mais côté châssis les anglais avait fait du bon boulot. La campagne d'optimisation sur la Nordschleife s'est superbement bien déroulée. C'est à ce moment du projet qu'une énième prise de tête entre Lee et Goeschel tourna au vinaigre, et Lee fut remercié.
Début 1999, les évènements se sont enchainés à vitesse grand V. Exit Pischetsrieder et Reitzle. Exit le Directeur de Projet qui avait succédé à Lee, et retour de Petra à la tête du Projet R50.
Début 2000, Gaydon passent le relais du développement à Munich, et BMW se sépare de Rover dans la foulée. Mais tout est prêt pour le lancement série.
Voilà pour la partie châssis de la 1ère génération. Pour la génération 2, tout le travail d'optimisation du châssis a été entièrement réalisé par BMW.
Un petit retour en arrière s'impose :
Au milieu des années 70, l'ancienne Mini est toujours un succès, mais BLC (British Leyland) réfléchit depuis quelques années à un successeur... Plusieurs projets ont été abandonnés, ou détournés de leur but initial, principalement pour raisons budgétaires.
L'ancienne Mini a poursuivi son existence pendant les années 80, mais fin de la décennie le moteur A arrivait en fin de vie, et à bout de souffle de développement. Les futures normes de dé-pollution qui allaient être mises en place au début des années 90 auront de toute façon raison de lui.
Rover avait remplacé le moteur A par le K dans le reste de la gamme, et la production de ce petit 4 cylindres commençait à poser de sérieux problèmes économiques (c'était déjà le nerf de la guerre)...
Autre problème : la Mini était alors produite à Longbridge, et pour ceux qui ont eu la chance de pénétrer dans cette usine ont gardé le souvenir d'une production quasi artisanale, avec un des taux d'automatisation parmi les plus bas au monde pour une production de grande série.
La Direction de Rover décide fin 1992 de relancer une nouvelle fois le projet de remplacement de la Mini. Désolé, mais je ne souviens pas du nom du PDG de Rover de l'époque. Par contre, lcelui du patron du design, c'était Gordon Sked. Il a présenté les premières ébauches de la nouvelle Mini à ses patrons en 1993. L'équipe des studios de Canley devait faire face à un autre challenge : il fallait que la nouvelle Mini remplace l'ancienne et la Métro, cette dernière étant en perte de vitesse...
Le premier mulet de la nouvelle Mini a été développé et présenté à Gaydon. Le chassis était basé sur une suspatte Hydragaz (qui avait fait ses preuves sur la Métro), et il me semble que le moteur était un 3 cylindres de 500 ou 600cm³. Ce mulet était formidablement agile et préfigurait l'étonnante tenue de route de la future New Mini.
C'est exactement à ce moment du projet que Rover a été vendu par British Aerospace à BMW. L'équipe de G. Sked a mis le projet en suspend pendant plusieurs mois en attendant de pouvoir le "vendre" en interne à BMW.
C'est là qu'intervient un acteur prépondérant de l'avenir du projet R59 : Bernd Pischetsrieder. L'ancient dirigeant de BMW, aujourd'hui fort décrié pour ses erreurs stratégiques et sa mégalomanie (pourtant loin du champion toutes catégories en la personne de tonton Ferdi), a toujours été fan des voitures anglaises. Et pour cause : Bernd, petit neveu de Sir Alec Issigonis, vouait une passion avouée aux véridiques veaux britanniques.
Bernd a mis en place en 1994 une structure de développement quasi indépendante en Angleterre. A Munich, il était bien clair que R59 était un projet Rover, dans lequel très peu de gens trempaient à Munich.
Devant le scepticisme des ingénieurs bavarois, Bernd fut "contraint" de prendre le projet R59 (nom de code donné par BMW) sous son aile. Le Directeur du Projet lui était directement rattaché. D'ailleurs, Bernd a renforcé l'équipe Projet par quelques pointures recrutées par lui-même, dont Moulton et John Cooper himself.
En 1994, j'ai commencé à bosser sur ce projet. A Gaydon, le projet était déjà bien avancé, mais à Munich, le radicalisme du véhicule (dans l'esprit de la 1ère Mini) ne plaisait pas à tous. N'oublions pas que le confort est une des valeurs fondatrices de BMW... Le bureau du design, sous l'influence des opposants de Pitschetsrieder commença à bosser sur une autre mouture de l'aspect extérieur. BMW voulait en effet une Mini qui soit à la fois un objet de mode, un véhicule économique et une référence du segment en terme de perfs.
Fin 1994 : Chris Bangle pousse son idée d'une nouvelle Mini Cooper, plus longue que la version Rover de 3,30m trop radicalement proche de l'ancienne Mini. Bangle s'assure aussi du support de W. Reitzle. BMW cherche plus à se rapprocher d'un successeur de la Cooper que de celui de la Mini.
En 1995, il y avait en fait 2 projets "New Mini" : une version anglaise basée sur une propulsion avec châssis berceaux + suspattes Hydragaz et équipée du moteur K en position arrière, et une version bavaroise, avec un McPherson à l'avant, et un multi-bras à l'arrière, avec à la place du moteur un gros point d'interrogation...
Lors de la présentation des deux concepts au Board en octobre 1995, l'unanimité s'est faite sur le concept Rover. Problème : avec une architecture au moins 10 ans en avance sur son temps, l'industrialisation allait poser un problème économique insoluble...
Entre fin 1995 et le printemps 1996, c'était carrément le foutoir, plus personne ne savait lequel des deux projets allait être abandonné.
Au milieu du printemps 1996, BMW a décidé de poursuivre sur la base du projet bavarois. Un nouveau Directeur de Projet (Chris Lee) a été nommé, et le véhicule a été rebadgé R50. Le projet a été alors été officiellement affecté au Centre de Développement Rover à Gaydon. L'ancien patron du développement BMW, Burckardt Goeschel, a piloté le transfert. A l'automne 1996, le projet anglais d'origine était définitivement enterré.
Par contre, le transfert de Munich à Gaydon s'est déroulé dans une ambiance délétère. Quasiment du jour au lendemain, plus personne n'a bossé sur le projet, et les britanniques se sont retrouvés faces à une montagne de problèmes à solutionner. Le Design Freeze avait eu lieu, mais sans moteur et sans boite. Les trains n'existaient que sur le papier (à l'état d'épure) et les mulets n'atteignaient pas de loin pas les perfs du projet britannique concurrent. Et surtout il n'y avait pas de concept d'industrialisation potable. Bref un beau merdier.
Autre problème : les ressources manquaient À Gaydon pour optimiser le châssis, et Chris Lee dû faire appel à BMW pour récupérer des ressources. Du coup, fin 1996, une nouvelle équipe d'optimisation châssis a vu le jour à Munich, mais sous la coupelle de Gaydon...
Le plus gros problème à l'époque, c'était le choix du moteur. Côté Rover, le moteur K ne semblait plus être la meilleure option, le package de la solution BMW ne permettant pas l'implantation optimale du moteur K. Côté BMW, on décide alors d'acheter le 4 cylindres Chrysler (après avoir approché d'autres constructeurs, mais le prix et le délai ont fait la différence). Donc BMW se lance dans l'aventure Tritec.
Pendant ce temps, les ingés de Gaydon essayent de se dépêtrer dans la conception des trains, le choix des matériaux, la définition des pièces et les Cahiers des Charges. A partir de là, BMW n'est plus intervenu ni dans la définition de la géométrie, ni des rigidités, des optimisations ou des essais de validation.
Le moteur Tritec a été adapté par Longbridge, ainsi que la boite. La Cooper S s'est vue équipée d'une boite Getrag.
En ce qui concerne les trains, l'objectif des ingénieurs anglais de Rover était simple : en faire la traction la plus maniable au monde. Le train arrière multibras a été très vite conçu, l'épure de BMW collant assez bien avec la rigidité attendue par les anglais. L'encombrement, par contre, s'était pas top... Et puis il y a eu des soucis avec le choix de BMW de laisser tomber les freins à disques au profit des tambours pour raisons budgétaires.
Le train avant, quant à lui, a été une horreur à développer. BMW voulait absolument un train avant "BMW", c'est-à-dire un McPherson. Alors que la solution optimale aurait été un double triangle. Du coup, de gros problèmes de transmission de couple dans la direction électrique sont apparus. Et les résoudre a été un vrai casse-tête. Ce train a coûté une fortune en développement... Heureusement que BMW assurait le financement. En 1999, la direction électrique proposée initialement par BMW a été abandonnée juste avant le lancement série. Elle ne donnait aucun feed-back et tuait le caractère incisif du châssis. Une nouvelle direction hydraulique sur base de Rover 25 a été développée par l'équipe de développement à Gaydon.
En 1997, le projet avait pris pas mal de retard. Mais côté châssis les anglais avait fait du bon boulot. La campagne d'optimisation sur la Nordschleife s'est superbement bien déroulée. C'est à ce moment du projet qu'une énième prise de tête entre Lee et Goeschel tourna au vinaigre, et Lee fut remercié.
Début 1999, les évènements se sont enchainés à vitesse grand V. Exit Pischetsrieder et Reitzle. Exit le Directeur de Projet qui avait succédé à Lee, et retour de Petra à la tête du Projet R50.
Début 2000, Gaydon passent le relais du développement à Munich, et BMW se sépare de Rover dans la foulée. Mais tout est prêt pour le lancement série.
Voilà pour la partie châssis de la 1ère génération. Pour la génération 2, tout le travail d'optimisation du châssis a été entièrement réalisé par BMW.
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