Annonce

Réduire

A LIRE IMPERATIVEMENT

Suite à une décision de justice (Arrêt N°344 de la  Cour d'appel de Rennes en date du 05 décembre 2023) contestant les droits possédés par Washington Photo sur certains de ses clichés photographiques) et interdisant de les reproduire notamment sur Internet sous peine de poursuites financières, il est donc interdit de poster et donc reproduire dans nos forums (notamment le forum endurance) toute photo issue du fonds photographique de Washington Photo. La transgression de cette interdiction exposera ses auteurs à des poursuites juridiques. Nous vous demandons donc de respecter scrupuleusement cette interdiction.
Voir plus
Voir moins

Formule1 d'hier et d'aujourd'hui

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • #31
    John Miles au pied...

    La vision de sa voiture très instable sans ailerons m’avait convaincu de garder les miens. Une conversation que je n’oublierai jamais s’ensuivit alors. Avant que j’aie pu dire quoi que ce soit, un ordre fusa de Colin :

    Enlevez les ailerons de la voiture de John ! J’ai répliqué par la négative.
    Colin a insisté :


    Virez-lui ses ailerons ! Confronté à ce genre de situation, je me fie toujours à mon instinct. La méthode la plus lente est souvent la plus efficace, se plaît à dire Jackie Stewart.

    J’avais une idée de ce qui m’attendrait sans ailerons, car même avec ses appuis, ma voiture était très nerveuse. Dans le premier virage, la Curva Grande, l’arrière partait, ainsi que dans Lesmo. Il n’y avait aucune adhérence. Pour la première fois, j’avais peur dans une voiture de course. Les essais se sont achevés. Jochen et moi étions respectivement 6e et 11e. Emerson était en 1,28 mais sa 72 était en panne quelque part sur la piste. Encore un pépin de plus.

    En ce temps-là, l’effectif du Team Lotus se montait à 12 personnes. On n’avait pas encore entendu parler de motor-homes ; les débriefings avaient lieu à l’arrière du camion.

    La seule façon pour toi de faire du bon boulot est d’enlever ces ailerons, avait renchérit Colin, ce à quoi je m’opposai.

    On construisait des voitures avant que les ailerons n’apparaissent, tenta de me rassurer Colin.
    Oui mais il me faut du temps pour régler l’auto, répliquai-je, à quoi Colin, têtu, avait répondu :


    Tu tourneras demain sans ailerons.
    Je ne veux pas.

    C’est un ordre, tu le feras !
    Et le dialogue s’est arrêté là.

     

    Commentaire


    • #32
      Si on imaginait CHAPMAN comme un type sympa ...son image en prend un coup...Bon mais on n'était pas naïf, si il l'avait été il n'aurait pas une telle réussite !    

      Commentaire


      • #33
        Oui CM TARGA c'était un anglais têtu !

        Suite du texte John Miles.

        Je me sentais mal. Etre en désaccord avec l'homme qui m'avait tant aidé ne me mènerait nulle part. Toutefois je savais mes jours comptés chez Lotus. Jochen, lui, était optimiste. Il avait réussi à régler la voiture sans ailerons en moins d'une heure et il se sentait capable d'en maîtriser l'instabilité. Pour ma part, j'estimais le risque trop grand.

        Nous n'avions pas la moindre idée du comportement aérodynamique de cette auto privée de ses ailerons. Je n'aimais pas cette approche irréfléchie du problème.

        J'avais abandonné Dave à sa check-list : réglages des sièges, rapports de boîte, etc. Je lui avais rappelé mon opposition formelle à la suppression de mes ailerons, mais je m'attendais au pire. J'ai quitté le paddock, ai passé une bonne nuit, et le lendemain (samedi), je suis tombé sur Jochen et Peter Gethin prenant leur petit-déjeuner. Nous avons causé ailerons. Stewart avait été sacrément rapide sans les siens, je suis sûr qu'il avait fait des essais ici même dans la semaine. La plupart des autres pilotes tournaient avec de l'appui.

        Ne t'inquiète pas, John, ça va aller, me fait Jochen. Alors qu'il ne restait qu'une séance d'essais ? J'en doutais. Je voulais faire les choses à ma façon.



        Samedi matin !

        Samedi matin, l'équipe Lotus paraissait plus sereine. Bien entendu, on avait ôté les ailerons de ma voiture.
        Désolé John, le Vieux m'a donné des ordres, s'est excusé Dave.

        J'avais perdu le contrôle de ma prise de risque. La journée s'annonçait belle. Jochen a pris la piste dès le début des essais. Dave finissait de faire le plein de ma voiture. Il avait modifié mon siège, ainsi que je le lui avais demandé. Dix minutes après, mécontent de mon sort mais confortablement sanglé, je quittais le paddock en roulant au pas en direction des stands.




        John Miles sur la Lotus n° 24.

        Commentaire


        • #34
          Là il a encore ses ailerons...
          Le voilà sans...
          1.jpg

          Commentaire


          • #35
            Merci à toi !

            Suite...

            Ces DFV était tellement souples, dociles. Avant d'avoir gagné la ligne des stands, je me suis rendu compte que les bruits de moteurs avaient cessé, seuls quelques borborygmes de Cosworth s'étouffant au pied des mécanos troublaient le silence qui s'était abattu sur Monza.

            Bizarre. Soudain, Colin, l'ingénieur Maurice Philippe et Dick Scammell se sont matérialisés devant moi, surgissant de la foule qui encombrait les stands.

            Jochen a eu un accident. Va voir sur place ce qui s'est passé ! lança Colin.

            Mon Dieu ! Que s'est-il passé ? Que puis-je faire ? J'aurais voulu rentrer dans un trou de souris. J'ai été soulagé quand les commissaires ont refusé que je prenne la piste. Bernie Ecclestone, le manager de Jochen à cette époque, suivi d'Eddie Dennis, ont cavalé comme des fous vers la Parabolique. Jochen avait été extrait de l'épave de sa voiture lorsqu'ils y arrivèrent. Un commissaire leur fit un signe qui indiquait le pire. Ils eurent le sentiment que son esprit n'était plus là, qu'il s'était envolé.

            Eddie a ramassé un morceau de disque de frein, et l'a balancé au loin. Il a trouvé une des chaussures de Jochen et aussi son casque. Tout l'avant de la voiture était parti. La voiture avait quitté la piste sur la gauche, heurté le rail et explosé dessus. Jochen n'était pas attaché.

            On l’a trouvé tellement enfoncé dans le cockpit que la boucle du harnais de sécurité était enroulée autour de son cou. Tout le monde s'est figé. Même les tifosis avaient fait silence. Une autre catastrophe pour Lotus à Monza, là où ils saisissent les autos et traînent les gens devant les tribunaux. Graham et Rob Walker ont rentré leur auto au garage ; Dick Scammell et moi leur avons emboîté le pas, en refermant le rideau presque complètement derrière nous, de façon à ne laisser filtrer de l'extérieur qu'un mince trait de lumière.

            Il ne restait rien de l'avant de la voiture de Jochen.

            Regardons les choses en face, il est mort, a murmuré Dick.


             

            Commentaire


            • #36
              Poignant !

              Commentaire


              • #37
                On voit le dessous de la F1 de l'époque que l'on beaucoup aimé.

                Suite du récit de John Miles.

                Il savait déjà car il avait vu le corps de Jochen transporté dans l'ambulance. J'étais terriblement bouleversé, mais aussi quelque part soulagé, comme si j'avais joué à la roulette russe et en avais réchappé. Graham avait souvent été de bon conseil envers moi. J'aimais son approche sensée et raisonnable de ce sport, analogue à la mienne. Mais là, dans cette lumière glauque, il semblait ailleurs ; il a demandé à Rob quand les essais reprendraient.



                La formidable photo du crash

                Il n'y aura pas, bien entendu, de départ à Monza pour le Team Lotus. Aux alentours de cinq heures, la mort de Jochen était officielle et toutes les 72 furent embarquées dans les camions. Je suis rentré à l'hôtel où j'ai vu Nina Rindt en plein désarroi, soutenue par son père, Kurt Lincoln, et par Helen Stewart. J'avais voulu dire quelque chose mais je n'y suis pas parvenu. J'ai dîné, ce soir-là, en ville avec Emerson et des membres de sa famille. Puis j'ai appelé Chris, mon épouse, et je me suis mis au lit.

                Piers Courage, Bruce McLaren, et maintenant Jochen Rindt. Sans compter les pilotes moins connus qui sont morts durant cette période et qui n’étaient pas moins importants à mes yeux. Voilà un sport que j’avais toujours rêvé de pratiquer, étant gosse, et qui se changeait aujourd’hui en une histoire d’amour tournant au vinaigre.


                 

                Commentaire


                • #38
                  Cette photo poignante de ce mécano LOTUS en pleurs sur les lieux de l'accident que je n'ai pas voulu mettre dans mon carnet 1970 mais qui ici s'impose...
                  1.jpg   

                  Commentaire


                  • #39
                    Oui cette photo est très vraie sans artifice !!! Emouvante !

                    Commentaire


                    • #40
                      Il savait déjà car il avait vu le corps de Jochen transporté dans l'ambulance. J'étais terriblement bouleversé, mais aussi quelque part soulagé, comme si j'avais joué à la roulette russe et en avais réchappé. Graham avait souvent été de bon conseil envers moi. J'aimais son approche sensée et raisonnable de ce sport, analogue à la mienne. Mais là, dans cette lumière glauque, il semblait ailleurs ; il a demandé à Rob quand les essais reprendraient.

                      Il n'y aura pas, bien entendu, de départ à Monza pour le Team Lotus. Aux alentours de cinq heures, la mort de Jochen était officielle et toutes les 72 furent embarquées dans les camions. Je suis rentré à l'hôtel où j'ai vu Nina Rindt en plein désarroi, soutenue par son père, Kurt Lincoln, et par Helen Stewart. J'avais voulu dire quelque chose mais je n'y suis pas parvenu. J'ai dîné, ce soir-là, en ville avec Emerson et des membres de sa famille. Puis j'ai appelé Chris, mon épouse, et je me suis mis au lit.

                      Piers Courage, Bruce McLaren, et maintenant Jochen Rindt. Sans compter les pilotes moins connus qui sont morts durant cette période et qui n’étaient pas moins importants à mes yeux. Voilà un sport que j’avais toujours rêvé de pratiquer, étant gosse, et qui se changeait aujourd’hui en une histoire d’amour tournant au vinaigre.



                       

                      Commentaire


                      • #41
                        Suite...

                        Les témoignages !

                        John Miles raconta c’était le vendredi !

                        "C’est alors que j’aperçus Jochen dans mes rétroviseurs. Il restait environ une demi-heure à tourner.

                        Il y avait quelque chose de changé sur sa voiture. J’ai ralenti. Il est passé sous le pont de l’anneau de vitesse dans l’habituel environnement de bruit et de turbulences. Dans Ascari, sa voiture était comme folle : l’arrière zigzaguait, elle utilisait toute la piste, même le tarmac où le circuit junior rejoint le grand circuit. Nous nous sommes arrêtés tous les deux au stand. Jochen avait fait 1'25"7, moi 1'26"5.

                        Il prenait 500 à 600 tours de plus en ligne droite sans ailerons. [...]. La vision de sa voiture très instable sans ailerons m’avait convaincu de garder les miens."


                        Denny Hulme raconta c’était le samedi !

                        "Jochen me suivait depuis plusieurs tours (4 ou 5) et me rattrapait, et comme je n'avais pas été très rapide dans le second Lesmo, je me suis rangé sur le côté et ai laissé Jochen passer. Je l'ai alors suivi jusque dans la Parabolique, [...] nous allions très vite et il a attendu les 200 derniers mètres pour freiner. La voiture est juste allée sur la droite, puis elle a tourné sur la gauche, puis sur la droite à nouveau avant de soudainement aller très vite sur la gauche, dans le rail."
                         

                        Commentaire


                        • #42
                          Suite...
                          Nous ne saurons jamais ce qui s’est réellement produit. On a trouvé l’arbre de frein (ces arbres étaient creux à l’intérieur pour gagner du poids.) avant-droit cassé. Une rupture nette tendrait à suggérer que la pièce a cédé dans le choc contre le rail ; une rupture de torsion serait à porter au compte de l’arbre de frein lui-même, qui en lâchant, aurait déséquilibré la voiture sur la gauche, comme la mienne l’avait été sur la droite lors de mes ennuis en Autriche. Il avait monté des pneus usagés, et d’autre part, il avait des plaquettes neuves.
                          On peut aussi imaginer que la balance des freins n’avait pas été adaptée à la faible adhérence du train arrière engendrée par l’absence d’ailerons, ce qui a pu l’envoyer direct dans le rail quand il a freiné. On a raconté aussi que Jochen avait été mis en garde par des membres de l’équipe Lotus qui s‘appuyaient sur mes dires, du risque encouru à tourner sans ailerons.

                          Des pièces cassent sur les voitures de course. Je pense que c’est ce qui s’est produit. Je n’imagine pas que Jochen ait fait une faute, même sur une auto aussi difficile à mener. J’ai pris le bus pour rejoindre l’aéroport, le jour de la course, avec Bernie Ecclestone. Il était à la fois très éprouvé et en colère. Il semblait vouloir désigner des responsables. Une semaine plus tard, le team manager Peter Warr et Maurice Philippe, déguisé en mécanicien, se sont introduits dans l’enceinte où était entreposée la Lotus accidentée et en ont prélevé le moteur, lequel n’était pas concerné dans l’enquête. Ce DFV fut installé dans la 72 d’Emerson et a gagné le GP des USA quatre semaines après.




                           

                          Commentaire


                          • #43
                            Suite...

                            Colin a dit que Lotus manquerait le GP du Canada pour se réorganiser. Il m’a donné son accord pour aller au Mans faire quelques prises de vues (John Miles avait collaboré au film Le Mans). Deux semaines après, je reçus un appel de Peter Warr m’informant que Reine Wisell me remplaçait. J’en ai été très chagriné sur le coup, mais rétrospectivement Colin avait sans doute raison. L’équipe avait besoin de nouvelles têtes, pas de quelqu’un dont la confiance était au plus bas. Au Glen, Emerson et Reine firent du bon boulot, en arrivant premier et troisième. La Lotus 72 avait commencé à rembourser ses dettes.

                            Une de mes meilleures décisions fut de décliner, ce même week-end, le volant d’une Lotus 70 F5000 d’usine à Brands Hatch. Alan Rollinson l’a conduite et l’auto a cassé, l’envoyant dans l’herbe un peu avant Hawthorn !

                            En ce qui concerne 72/R2, la voiture de Jochen, des rumeurs prétendent qu’elle serait détenue par un particulier en Suisse. J’espère, pour ma part, que ce qu’il en reste est parti là où est sa vraie place – dans un broyeur."



                            Un texte de John Miles pour ITV Télévision (1999), traduit par Patrice Vatan€‹â€‹â€‹â€‹

                            Johnny Rives, pour le compte de L’Equipe, raconta avec ces mots la fin d’après-midi à Monza tandis que la mort de Jochen Rindt venait d’être officialisée.

                            « Les pilotes furent très affectés par la nouvelle. Mais ils l’accueillirent avec flegme. Ils savaient que n’importe lequel d’entre eux aurait pu connaître le sort de Rindt. C’est un risque qu’ils ont pris au moment décisif de suivre leur incroyable vocation. En tandis que pour la millième fois, on se demandait si la beauté de la vie qu’ils ont choisie vaut réellement le prix que certains paient, ils se remirent en piste l’un après l’autre. Vers le soir, tous s’étaient remis à tourner. Le soleil ayant basculé vers l’horizon, la chaleur était devenue moins lourde et les moteurs donnaient leur plein régime ».

                            C’était l’époque ce qui n’empêchait pas Stewart, Rindt, Beltoise de tout faire pour plus de sécurité.
                             

                            Commentaire


                            • #44
                              Il y a 50 ans disparaissait Piers Courage le 21 juin à Zandwort ! Souvenirs !

                              Commentaire


                              • #45
                                terrible accident handisport pour Zanardi, voir par ailleurs
                                Vous aimez les 24 heures, le polar, le suspens, la pop music, la 2è guerre mondiale, la poésie ? c'est ici!
                                www.l-oree.org

                                Commentaire

                                Chargement...
                                X